Lumieres dans la nuit/23

J’ai rêvé, mais c’était tellement vrai, j’espère que Magalie me donnera une explication, car à part elle je ne vois personne.

A moins que ce soit mon subconscient, mais pour quelles raisons ? Après ce que j’ai vu je ne devrais pas avoir ce genre de rêves. Mais on ne commande pas ses rêves. Bon il est six heures, une douche et je vais remettre mes idées en place.

Tout en me douchant j’essaye de me souvenir si c’était un rêve ou si c’était réel. Quand je sors je suis certain que Magalie m’a rejoint. A-t-elle eu des remords et au petit matin elle s’est enfuie ? J’espère qu’elle me donnera une explication.

Je sens une odeur de café est-elle réveillée

Ah bonjour Damien, sympa de préparer le café

Non je suis intéressé par ta balade en hélicoptère. J’ai eu un appel de Thomas, il n’arrivait pas à te joindre.

Tu lui as demandé si tu pouvais venir, mais il me voulait quoi

Il t’en parlera lui-même il ne va pas tarder, il m’a dit prépare moi un café le mien n’est pas fameux.

Mais il m’avait dit 7 h, Magalie n’est pas encore levée.

Elle vient ?

Oui, ca te dérange ?

Non mais…

On parle de moi ?

Oui

Et ?

Rien , Damien nous accompagne et je lui dis que tu viens.

Et je pensais qu’il n’y avait pas assez de places.

Ah d’accord, vous avez bien dormi

C’est Damien qui répond le premier,

Oui merci et vous ?

Moi j’ai fait un rêve étrange

Magali me fait une drôle de tête, elle vient vers moi et nous dit :

Moi aussi

Et Damien se met à rire et nous dit c’est peut-être le même. Mais nous sommes sauvé par l’arrivée de Thomas. Nous verrons plus tard.

Bonjour, ah tant mieux que vous soyez là Magalie, ce que j’ai à dire vous intéresse également car vous seule allez pouvoir regarder cette photo et me dire si vous reconnaissez cette jeune fille.

Il me l’a passe à moi, et je comprends la raison pour laquelle il veut l’avis de Magalie, c’est la seule à ne pas avoir vue réellement la jeune fille.

Attends avant de lui passer la photo, j’ai une question, j’ai reçu tôt ce matin les résultats de l’autopsie de la jeune fille du souterrain. Pouvez-vous me dire si Jamila a eu un bébé ?

Non

Meme pas dans sa famille

Non, elle avait 10 ans quand elle est arrivée chez Paul et Béatrice.

Ah oui en effet, bon regardez la photo. Est-ce Jamila ?

Dès que Magalie prend la photo elle répond immédiatement, non ce n’est pas elle, par contre j’ignore qui elle est ?

Tu fais une drôle de tête Xavier

Oui, je me souviens d’un détail qui me chiffonnait

Lequel ?

Priscilla m’a décrit comment Jamila était habillée dimanche pour son anniversaire, une jupe blanche avec des coquelicots et un tee-shirt rouge. Si la jeune fille que nous voyons sur la photo avait un tee-shirt rouge, elle portait un short. Et nous savons par différents jeunes qu’ils devaient redescendre dimanche soir. Ils ne risquaient pas de se changer.

Donc où se trouve Jamila ?

Et qui est cette jeune fille ?

Pour cette jeune fille je pense que le capitaine Frémont va pouvoir nous répondre.

Pourquoi ?

Hier au soir il a eu la visite d’une famille de Marseille, ils avaient fait la descente de l’Ardeche avec des amis. En rentrant ils n’avaient pas vu leur fille âgée de 15 ans qui était invitée à un anniversaire dimanche. Et, qui par la suite restait avec des jeunes qui se connaissent depuis des années. Ils viennent dans ce camping depuis dix ans. Un des copains a dit qu’elle avait téléphoné lundi matin en disant qu’elle s’amusait bien et qu’elle reviendrait dans la journée de mardi. Mais depuis mardi plus aucune nouvelle. Mais ils ne se sont pas inquiété.

Mais où est Jamila ?

Nous nous souvenons de nos appels dans différents souterrains mais tous arrivaient devant l’éboulement ou d’autres, nous n’étions pas convaincu que toutes les ramifications donnaient sur le couloir central. Les cellules étaient les oubliettes d’autrefois. Thomas s’était procuré un plan du château de Voguë dont celui de Lajaresse était sa copie conforme.

Je pense que nous n’irons pas à Lyon ce matin, il faut que nous retrouvions cette gamine. Et surtout pourvu qu’elle soit vivante.

J’allais te le proposer, par contre le lieutenant Perrin va emmener les trois prisonniers, ils doivent rejoindre la police judiciaire où ils sont attendu. Et nous irons demain selon les résultats de notre recherche.

Il est à peine sept heures, penchés sur les plans nous sommes attentifs à faire le parallèle entre les plans tracés à la hâte du château de Lajaresse et ceux de Voguë.

Je vais chercher Claude, il est souvent allé se balader dans les oubliettes étant gamin.

On fait une pause, on doit réfléchir à ce que nous avons raté hier.

Claude venait à peine de se réveiller lorsque je suis arrivé chez lui.

On a besoin de tes lumières

Tu peux me laisser déjeuner, je croyais que tu partais sur Lyon ce matin ?

Oui c’est ce qui était prévu mais il y a un gros problème et je lui explique.

Merde alors et qui est cette fille,

Elle etait en vacances au Camping

Personne n’a signalé sa disparition.

Ses parents sont rentré hier au soir , il faisait la descente de l’Ardeche.

Sans elle ?

Oui elle devait assister à l’anniversaire de Jamila, elle a dû être invité par les gamins.

Et vous avez besoin de moi pour quelles raisons?

Tu m’as dit avoir joué dans les souterrains tu dois les connaître plus que nous. Thomas a récupéré un plan au Syndicat d’initiative de Voguë. Il y a les plans du château et comme ils sont construits à l’identique en mettant en marche nos souvenirs nous devrions trouvé la manière pour se rendre dans la salle de garde.

Bon je te suis et tu me payeras un café

Sans problème, on a même de la brioche que Thomas nous a acheté avant de monter.

Top pour la brioche du vieux Michel, elle vient sûrement de là c’est le seul boulanger d’ouvert le samedi matin. Si ce n’est pas Jamila il faut que tu appelles Paul son père d’accueil comme dit Julien.

Nous l’appelons lorsque nous aurons retrouvé la petite. J’espère qu’elle est vivante.

Ce serait la meilleure nouvelle, cela suffit amplement que cette gamine soit décédée.

Tu oublies le jeune ?

Deux de trop, les vacances ne peuvent pas se terminer par des drames pareils.

Ah vous voilà, nous pensons avoir trouvé la salle de garde tel qu’elle est indiquée sur le plan de l’autre château. Dis-nous ce que tu en penses Claude et surtout comment allons-nous pouvoir l’atteindre ?

Claude dessine sur le papier qu’il a apporté le souterrain avec ses cellules et son poste de garde comme lui il en a gardé le souvenir. Il le compare à Voguë, c’est à l’identique. A notre tour de noter d’une autre couleur le chemin que nous avons fait et où se trouve l’éboulis que nous avons tous remarqués. Mais nous le faisons sur son propre dessin. Thomas, Damien, Claude et moi, il manque Joris. Mais par déduction nous allons trouver.

Voilà l’entrée se situe là et cela veut dire que nous devrions passer du côté de l’autre village, il a un nom ? Ce bled ?

Non pour l’instant il n’a pas d’existence, il y a juste une maison debout, le reste a été laissé à l’abandon.

La maison appartient à qui ?

Ah ça si vous vous adressez à moi je n’en sais strictement rien. Je peux aller demander à mon père.

il est 7 h 30 est-ce que tu penses qu’il est levé ?

Oh oui, il se lève tôt, et ce matin il devait traire les vaches.

En effet je n’ai pas eu mon lait du matin.

Tiens qui frappe à la porte ?

Ah bonjour Capitaine Frémont que nous vaut votre visite matinale ?

La petite est Anaïs Légal originaire de Marseille, elle avait flashé pour le Mich. Nous avons retrouvé Sophie qui rôdait près du camping. Et elle nous a appris de nombreuses choses, mais elle nous a fait perdre du temps.

Que vous a-t-elle appris ? Où est son père

Il est au camping sous bonne surveillance, vous aviez raison Commandant , il a bien une caravane au camping de l’Arche.

Que vous a dit Sophie ?

Qu’elle s’est battue avec Anaïs pour les beaux yeux de Mich, mais il les a giflé toutes les deux. Et enfermées dans une oubliette chacune. Elle a appris qu’il préférait cette petite oie blanche de Priscilla. Ça l’a mis en colère. Pour la punir le directeur l’a frappé et elle lui a dit qu’elle voulait coucher avec lui. Mais il lui a demandé de simuler un viol et il a filmé la scène.

Herve a du souci à se faire avec cette gamine, d’autant plus que Julien l’a croisé hier avant qu’elle ne quitte le village avec un individu appelé Zoï le magnat. Un récidiviste notoire de Lyon, plus précisément de sa banlieue.

Donc vous voulez rentrer par le souterrain qui débouche au bas des falaises. Mais je pense que vous n’avez pas besoin d’entrer si loin. La cour est carrée vous êtes tous arrivés au delà des quatre angles forcément vous étiez tous avant la salle de garde. L’éboulement a eu lieu dans les quatres accès.

Thomas tu as réussis à retarder le départ pour le canoë kayak ?

Oui

Nous avons une trousse de secours, de la nourriture genre barres de céréales, du sucre, de l’eau, des lampes. Joris est dehors il nous attend, son voisin vient, j’ai récupéré les deux jeunes d’hier. Capitaine avec vos hommes vous prenez ce chemin , nous avons laissé des pelles. Qui dit souterrain dit danger de se perdre. Chacun des groupes prend une pelote de ficelles et nous ne l’a lâchons sous aucun prétexte.

Nous voici parti en 4 groupes et Magalie s’occupe de coordonner tout le monde. La descente dans les entrailles du château nous rappellent celle d’hier, dans mon groupe personne ne parle. Nous devrions être en bas à hauteur des oubliettes vers 7 h 45 si aucun éboulement a eu lieu dans la nuit.

A 7 h 43 ma radio grésille, c’est le groupe de Thomas ils ont fait la jonction. Puis celui de Damien suivis de près et Claude et moi. Joris dit que la voûte a tenue en partie et qu’ ils étayerons si le besoin s’en faisait sentir.

Comme personne ne connait l’épaisseur des pierres on décide de lancer un appel.

Nous nous coordonnons tous à la montre de Thomas et nous commençons à enlever les pierres qui obstruent le souterrain. Puis à neuf heures piles, je lance un appel :  » Jamila, Jamila si vous êtes là répondez – nous… »

Trois fois je renouvelle mon appel et nous attendons. Rien ne se produit. Thomas en fait autant, Damien et Claude aussi à intervalle d’une minute.

Soudain le doute n’est plus permis on entend loin très loin une petite voix nous répondre je suis là. J’en informe par radio les autres groupes. Et là, surprise Thomas nous dit que c’est de son côté que la petite doit être car il l’entend plus fort que du côté de Damien entre autres qui l’a enregistré.

Du cote de Thomas et de Joris les pelles se mettent en action, mais il faut se rendre à l’évidence le travail est titanesque. Les trois groupes vont rejoindre Thomas. Et nous allons nous organiser.

Une demi heure plus tard nous sommes tous les uns derrière les autres et nous nous passons les pierres, deux autres récupèrent la terre et l’évacue dans les cellules. Enfin un trou est devant Thomas. Claude étant le plus mince de tous il va se glisser dans l’espace, Joris étaye le reste de la voûte.

Les minutes sont longues puis Claude nous appelle :

Jamila est vivante mais très faible, Damien que dois-je faire ?

Damien lui explique ce qu’il doit faire, puis décide de passer lui aussi il sera plus utile de l’autre côté.

Puis on entend à nouveau Damien qui nous annonce :

Il y a un autre blessé mais lui est assez amoché.

A Suivre…

L’enfant de personne /17

Saint Etienne 26 mai 1944

Il est six heure du matin lorsque les portes du train s’ouvrent. Cette  marée humaine qui se déverse sur les quais de la gare semble hypnotisée, les gens sont exténué, fatigué, la nuit a été   longue.
J’ai discuté avec trois jeunes filles qui se rendent à Saint Etienne pour y passer leur Brevet Élémentaire. ( voir bas de page).

Elles sont traumatisé par ce qu’il s’est passé, je les réconforte du mieux que je peux et leur propose que nous fassions la suite du voyage ensemble. La vie continue même en ces temps troublés toutefois je m’étonnais  qu’elles aillent sur Saint Etienne, plutôt qu’à Lyon passé leur examen. Mais je me gardais bien de le leur demander.
Alors que nous attendions en ce  26 mai 1944 un train fantôme qui se faisait désirer je vois arriver un couple, une belle jeune femme soutenant un vieil homme. Il me semble reconnaître une de mes compagnes de l’orphelinat. A-t-elle senti mon regard se poser sur elle ? Toujours est-il qu’elle a levé les yeux, esquisser une grimace et poser son index sur sa bouche me faisant comprendre que je ne devais pas m’approcher d’elle, et encore moins lui adresser la parole. C’était Adélaïde avec son père adoptif. Elle fait asseoir le vieux Monsieur puis lui murmure des mots mais je sens qu’elle parle de moi, car le vieil homme me regarde. Il a bien changé, il est méconnaissable. Elle le serre dans ses bras et repart en sens inverse et attend. Lui  reste assis, mais Adélaïde s’arrête alors que notre train est annoncé en gare.

A ce moment on entend que nous devons nous éloigner du quai car un train de soldats va passer assez vite. Effectivement on entend son long sifflement et nous voyons son panache de fumée. Le vieil homme se lève, se redresse et se jette sous le train au moment  de son passage. Je vois Adélaïde qui pleure et je vais pour la prendre dans mes bras mais elle fait mine de tomber , s’agrippe à mon bras et me glisse au creux de la main une médaille et un papier. Je serre la main, m’éloigne d’elle, monte dans un wagon et me fond au milieu de plusieurs femmes et d’hommes.  Je ne sais pas ce que fait Adélaïde mais à ce moment un bruit de bottes se fait entendre. Un silence pesant envahi le quai. Les gens qui traînaient se précipitent à l’intérieur. Le train démarre sous les hurlements de la Gestapo. Je regarde machinalement par la fenêtre et je vois Adélaïde le visage tuméfié partir bien encadré. C’est à ce moment que le train freine et que plusieurs soldats montent dans notre wagon et sûrement dans d’autres et cherchent je ne sais qui, en espérant que personne ne dira que j’ai tenu la main de ma compagne de l’orphelinat. Ils passent devant moi et se précipitent sur un type qui refuse de se lever mais ils l’emmènent de force. Quand je croise son regard je trouve qu’il ressemble au père d’Adélaïde. Les portes se referment et le train part. Ouf… Je n’ai pas été inquiétée je dois avoir de la chance.

Les trois jeunes filles qui ont pris place sur les banquettes pleurent et tremblent. J’avoue être dans le même état même si je ne pleure pas. Il faut que discrètement je regarde ce que m’a confié Adélaïde. La médaille est une médaille de baptême, je lis  » Baptiste  20 mai 1944 « . Sur le papier il y a une adresse à Lyon, orphelinat St Joseph. Et ajouté à la hâte un mot avec ces quelques mots.  » Toute personne qui trouvera cette médaille et cette lettre pourra aller dire à mon fils que sa mère est morte pour que vous puissiez vivre heureux. Et, si votre coeur est grand adoptez mon enfant, son père est mort fusillé et moi… »
La lettre n’était pas terminée. Je n’aurais pas dû croiser sa route, mais le destin l’a voulu. J’ai glissé dans la poche de ma veste la médaille et la lettre et je les ai oublié pour la fin de mon voyage. Mais je pensais à ce que nous venions de vivre. Le suicide du vieux Monsieur, Adélaïde emmenée, le jeune homme arrêté et cet enfant seul. Je me suis faites une promesse si je ressors vivante et je l’espérais j’irai voir cet enfant, en espérant toutefois que sa mère puisse le retrouver avant moi. Pourtant je craignais le pire.
Avec l’insouciance de leur âge, les jeunes filles riaient à nouveau sous l’air réprobateur d’un jeune homme. La plus grande, comme je la surnommait, m’informe qu’elle a 23 ans, que seules ses  deux  jeunes soeurs vont passer  l’examen.  Elles espèrent être à l’heure. Il faut qu’elle soit à 9 h 30 au lieu du rendez-vous. Il est un peu plus de 8 h mais le train se traîne.

A Givors il s’arrête, des travailleurs en descendent d’autres montent. La vie continue dans nos usines. Beaucoup de jeunes aussi, allant passer leurs brevets. Il y a de nombreuses gares dans la « Vallée du Gier » le train s’arrête de partout. Enfin après Saint-Chamond il peut s’élancer plus aucune gare comme le confirme un jeune qui vient de monter.
Nous voici en gare de Chateaucreux au moment où retentissent les sirènes, les  Anglais et surtout les Américains bombardent énormément ces temps-ci.
C’est une belle journée le ciel est d’un bleu limpide, pas un seul nuage, on se croirait en été. Les gens s’affolent et cherchent des abris. Je suis séparée des petites jeunes filles. Avisant un chef de gare je lui demande si je suis loin du pensionnat des soeurs Saint Joseph, il me regarde éberlué, puis me dit vous avez le temps, les avions ne sont pas pour nous mais pour Saint-Chamond, ils font des armes pour les occupants. Ils m’indiquent la rue à prendre et je m’éloigne rapidement de la gare. Les tramways sont tous à l’arrêt. Il y a peu de monde dans les rues.

A suivre …



( Âge ( 16 ans) où l’on passait le brevet élémentaire. Le brevet des collèges n’a rien à voir avec cet examen qui est plus de la valeur du bac des années 70.

A 14 ans garçons et filles passaient le certificat d’études et partaient pour la grande majorité travailler.)

L’enfant de personne /9

Juin 43 à juillet 44

Me voici loin de la ferme, je tourne depuis un petit moment en rond quand j’entends parler, je n’ai pas peur car devant moi surgissent trois fillettes, elle me demande si je me suis perdue.
Je leur répond je me suis perdue et j’ai très mal au ventre, je n’ai rien mangé depuis trois jours à part quelques myrtilles et framboises. J’ai soif. Puis je m’arrête car la plus grande âgée d’une quinzaine d’années me prends par la main et me dit qu’elle va m’emmener chez ses parents qui ont une ferme à la sortie du village.


Maman voici Magdeleine elle attend un bébé et depuis elle erre par les chemins. J’ai dû faire deux pas et je me suis écroulée à ses pieds.
J’ai mis longtemps à me remettre, au début j’espérais que cet enfant qui grandissait en moi allait partir, j’aurais pu le perdre mais comme me disait le médecin qui était venu me voir, appelée par Mariette, la mère des cinq enfants après que je me sois évanouie, il est bien accroché votre petit. Si après sa naissance vous ne voulez pas le garder je comprendrais, je trouverais une nourrice et quand la guerre sera terminé si vous avez des remords vous pourrez revenir le chercher.
Je n’en étais pas encore là, je ne me projetais pas dans l’avenir. J’étais choyée chez Mariette et Paul, j’étais comme leur fille et la jumelle du fils aîné qui avait mon âge d’où l’idée de la petite Elisabeth tout juste âgée de 5 ans de le proclamer haut et fort.
Je ne le connaissais pas il était là -bas, c’est à dire dans le maquis, il avait fui le STO et avait rejoint le « Maquis de l’Ain ». C’était son groupe qui était venu avec un jeune du coin, blessé dans une embuscade à la ferme de Jules car il ne pouvait pas l’emmener avec eux. La suite tout le monde la connaissait. Pierre au petit matin avait ramené son compagnon d’infortune chez ses parents. Le médecin qui lui aussi était dans la Résistance pouvait venir s’occuper de lui et le soigner grâce à moi dont il suivait ma grossesse.


Il s’entourait toutefois de toutes les précautions possibles pour ne pas exposer les parents de Pierre, ni moi car on ignorait si Jules avait dit quoi que ce soit à ses amis Allemands ou aux gendarmes.
La mort de Jules avait fait grand bruit aux alentours, mais la plupart ne le regrettait pas. C’est ainsi que j’appris que sa femme n’était pas partie chez sa sœur mais qu’elle était morte deux mois après la naissance de son petit Joseph. Le vieux curé l’avait trouvé dans un grand sac de paille et il l’ avait confié à Sophie la sœur de Mariette qui avait perdu son bébé l’an passé.
Les gendarmes étaient montés à la ferme après avoir trouvé dans ses langes un mot écrit par sa mère où elle avait écrit ses mots glaçant :  » je m’appelle Joseph, ma maman c’est Marguerite. Je suis né le 15/04/1941. Si je suis là c’est que ma mère est morte sous les coups de Jules B mon père.
Les gendarmes accompagnés du maire s’étaient rendus à la ferme. Jules avait joué l’innocent disant que sa femme était partie chez sa sœur à Arles. Ils étaient repartis fort étonnés mais c’était sans compter sur la pugnacité du maire qui, une nuit était remonté à la ferme avec deux ou trois hommes dont l’epoux de Mariette. Jules cuvait dans sa grange et ils avaient retrouvé sa pauvre femme morte dissimulée non loin des porcs. Son visage était tuméfié et le médecin avait confié à Mariette et Paul qu’elle portait sur le corps bon nombre de sévices. Contrairement aux propos de Jules sa femme n’était pas partie. L’enquête en ces jours troublés s’étaient éteintes car Jules parlait de rôdeurs ne pouvant ni accuser les maquisards ni les Allemands. Les gendarmes profitaient de ses largesses ils ne l’avaient pas arrêté.
Je n’aurais jamais dû l’apprendre mais le médecin avait bien compris que Jules n’était pas le père qu’il laissait entendre avant la guerre mais un véritable bourreau pour quiconque s’opposait à lui. Ce brave docteur m’avait pose des questions sur le jour de mon arrivée et s’il se comportait bien. Rapidement en mots simples et succinct il m’avait raconté que sa seconde femme était morte sous ses coups. La malheureuse avait réussi à se traîner au village avec son bébé pour le soustraire à la bestalité de son père. Elle avait croisé le garde champêtre mais elle avait une cape avec une capuche et portait un panier comme lorsqu’elle livrait ses oeufs au café du coin. Il n’avait pas pensé qu’elle y avait déposé son bébé.


En voyant mon ventre s’arrondir je songeais que j’avais échappé à un drame et que je comprenais mieux la raison pour laquelle il essayait de me frapper au ventre.


A suivre

L’enfant de personne/ 8

Le calvaire ( fin)

Ce matin alors que je verse le café au commis je suis prise de nausée, je vomis. Je me demande ce qu’il m’arrive. Tonio me regarde et me dit vous allez avoir un bébé, ma soeur aussi ça lui arrive le matin de vomir. Et la mère a dit elle s’est encore faites engrosser par son boche.

Ah bon lui dis-je, elle vit avec un occupant.

Non, mais elle fricotte avec eux.

Et sur ces mots il prend sa casquette et s’en va. Je me sens dégoûtée et sale, j’ai un bébé qui pousse dans mon ventre, je ne peux pas rester ici. Il faut que je m’en aille coûte que coûte, je ne dirais rien à la brute épaisse avec qui je suis contrainte de vivre que j’attends un enfant. Car je n’ai pas eu mes petites affaires comme dit Jules. Mais cela m’est déjà arrivée plusieurs fois sans que je sois grosse.

Faire comme si, je dois être docile, ne faire cas de rien et chercher comment m’en aller. J’ai découvert dans la cave où il continue de m’enfermer que derrière des pots de conserves il y avait une porte qui partait dans la campagne. J’espère de tout mon coeur qu’à la nuit tombée ces « nouveaux amis » viennent. Comme à son habitude il fermera la trappe et il reviendra me chercher une fois sa nuit de beuverie terminée. Dès que j’y serais je partirais. Une fois j’ai eu envie mais je n’en ai pas eu le courage. C’était l’hiver je n’étais pas habillée pour affronter les intempéries des hauts plateaux du maquis de l’Ain.

On est à la fin du printemps 43 demain ce sera l’été, même qu’avec ma robe ou ma blouse je pourrais parcourir des kilomètres et il ne me retrouvera jamais. J’ai trouvé une paire de bottes, elles me vont je les ai planqué pour un éventuel départ si l’occasion se présentait.Hélas, rien ne s’est passé personne n’est venue à la ferme, je tremble qu’il découvre que j’ai pris du poids. Il m’a dit après toutes les fois où il m’a prise de force ou non que je devais être stérile car des bébés il en avait eu énormément. Sa première femme en avait eu cinq dont deux vivants, quant à la seconde elle en avait eu trois, deux à l’hospice des indigents à Lyon, le dernier avec sa mère à Arles. Plus disait-il en ricanant toutes les filles qui lui tombaient sous la main.

Cela fait un mois que je suis certaine d’attendre son enfant. J’ai grossi, lui pense que je mange dans son dos, il voulait me fouetter pour me faire rentrer mon ventre lorsque nous avons entendu plusieurs voitures arrivées dans la cour de la ferme. Il m’a fait descendre dans la cave, il était 15 h jamais ni les gendarmes, ni les allemands étaient venus en journée. C’était bizarre, j’entendais des cris, des bruits forts, des chaises renversées puis une voix disant on l’embarque et, finalement un coup de feu. Des voitures qui repartent et plus aucun bruit.

La cave est éclairée par une ampoule faible, depuis quelques secondes elle clignote, elle va s’éteindre. Rapidement j’essaye de pousser l’étagère et je découvre stupéfaite qu’un mur remplace la porte qui aurait dû me permettre de m’échapper. Jules ne revenait pas me chercher, était-il mort ? Ou était-il parti avec ceux qui hurlaient. Il fallait que je remonte l’échelle qu’il n’avait pas eu le temps d’enlever et que j’essaye d’ouvrir la trappe. A la première tentative je ne la soulevais que de quelques millimètres. A la deuxième un peu plus mais elle redescendait bien plus vite que je ne la soulevais.Il me fallait un morceau de bois pour la coincer. Je redescends les marches étroites en évitant la chute et trouve entre deux éclairs de la lampe un gros gourdin. Avec ce sésame de fortune et m’aggripant tant bien que mal au montant j’arrivais à soulever la trappe, à glisser le gourdin et je me faufilais par la petite ouverture. La chambre était intacte contrairement à la cuisine, tout était sans dessus dessous. Les placards de victuailles étaient vides. Heureusement mon sac à dos lui n’avait pas bouger et au fil des jours j’y avais mis des noix, des pommes, de vieux fromages un ou deux quignons de pain noir que l’on donnait aux cochons. La récolte était maigre mais j’arriverais bien à trouver un lieu plus accueillant.

A l’extérieur j’eus la surprise de voir Tonio le commis qui avait creusé un trou, en me voyant il se mit à pleurer en me disant les maquisards ont tués votre mari. Je ne lui dit rien sauf je devais m’en aller indiquez moi de quels côtés sont les maquisards.

– Vous êtes folle partez plutôt par la forêt et cachez-vous si vous entendez des voix.

Ce n’était pas mon mari il me séquestrait.

Tonio est abasourdi, mais c’était un brave gamin, il laissa le corps de Jules et m’a indiqué par quel chemin je pouvais rejoindre le petit village du Cerdon.

– Comme vous n’allez pas vite vous allez devoir vous arrêtez en chemin, je connais un endroit qui s’appelle la vieille ferme. Il y a à gauche de cette bâtisse une grotte, vous pourrez y passer la nuit. J’espère que vous avez des vêtements chauds car les nuits sont froides en altitude. Attendez-moi je reviens.

Tonio parti à toute vitesse dans l’écurie, quand il fut de retour il serrait sous son bras un grand manteau de berger c’était celui de la fermière.

– Avec cette grande cape vous n’aurez rien à craindre ni de la pluie ni du froid mordant des hauts plateaux. Maintenant partez vite, il y avait beaucoup de victuailles car c’était jour de ravitaillement. Le Maquis a dû être informé. Les Allemands seront là dans quatre heures. Je pars et je ne reviendrais plus, je laisse le corps du patron. Courage Mademoiselle adieu.

A suivre…

L’enfant de personne/5

Deux ans de calvaire ( première partie)

Si j’avais su ce que ces mots voulaient dire être gentille je me serais enfuie, mais cet homme était non seulement méchant, brutal mais énorme et face à lui je ne faisais pas le poids.La première nuit il m’a violé dans la grange, s’est relevé m’a demandé pardon et je ne l’ai pas revu avant le lendemain matin.


il était à moitié couché sur moi, il ronflait, j’étais nue et complètement écrasée par cette masse de chair flasque qui me donnait des hauts le cœur. La chambre ressemblait à une bonbonnière rose. Le lit était entouré d’un voilage blanc comme ceux d’une mariée. C’était un lit de princesse.

Quand il a ouvert les yeux il m’a touché le visage avec ses gros doigts aux ongles noirs, j’ai eu un haut le coeur, il s’est mis à rire et m’a dit :- Fais pas ta mijaurée, cette nuit tu m’as offert ton corps et je t’ai dévoré toute crue. Tu me disais encore Jules. J’ai bien profité de toi, tu n’as pas chialé, faut dire que je t’ai fait boire. De cette manière tu ne criais pas. Soit tu m’acceptes et tu l’as ferme soit je te fais boire et je te prends quand même. Mais tu es un beau brin de fille et c’est bête de gâcher un si beau moment.

J’avais mal de partout. Il s’est levé, s’est habillé m’à empoigné par les cheveux m’a jeté une vieille blouse à la tête et m’a dit  » va préparer le café »

A suivre…

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