La vie d’à côté (suite 1)

Après la pause on pourrait entendre voler une mouche dans le laboratoire aseptisé, les filles travaillent vite et bien, mais elles sont à bonne école sous le regard implacable de Mademoiselle, la contremaîtresse la plus aigrie et méchante que l’atelier d’emballage est connu depuis ces dix dernières années.

Le tocsin comme disent les filles  se fait entendre et là c’est la délivrance, les filles du découpage et celle de l’emballage se rejoignent toutes au sous-sol au niveau des douches. Mais pour les trente filles, il n’y a que trois douches, aussi elles passent trois par trois pour pouvoir rentrer le plus vite possible chez elle. Pour cette fois ci, Myriam décide de se passer de la douche, elle verra à l’avenir, chez elle, elle possède une baignoire et une douche, de plus à part cette odeur de sang elle ne se sent pas vraiment sale. L’atelier où plus précisément le laboratoire est d’une blancheur immaculée, bien que le sang laisse de grandes marbrures qui au fil du matin vire rapidement au brun rougeâtre. Mais à la pause les petites mains passent un coup d’éponge pour qu’à nouveau se soit propre. Soudain le brouhaha diminue en intensité on entend plus que le bruit de l’eau qui tombe sur les caillebotis en bois, quelques filles sont parties, Myriam va à son tour pour franchir la porte quand cette dernière s’ouvre sur « Olive ». Quel gougeât pense-t-elle, il ose s’introduire dans les douches des femmes, et devant son air goguenard elle lui dit :

  • Ah mince, vous arrivez trop tard, vous auriez pu me voir à poil.

Et, elle sort laissant ce fils à papa sidéré sur le seuil des douches. Les filles osent lui faire ce genre de remarques maintenant, mais personne ne lui a fait ce sale coup la première fois, au contraire, il les avait souvent trouvés à poil et il avait pu jouir du spectacle qui s’offrait à ses yeux, mais celle-là était d’une toute autre trempe. Mais il aimait bien ces passes d’armes. Il avait pratiqué ça toute sa vie, donc il saurait la mater.

Myriam quitte les filles sur le parking, elle fait connaissance de celles de la découpe, mais elle ne s’attarde pas, elle doit se contenter d’un petit hochement de tête, lorsqu’elle franchit la grille, le garde lui remet un badge, et lui dit :

  • Bienvenue Mademoiselle, je vous souhaite bonne chance au sein de l’ « Entreprises Carré », vous trouverez au dos de votre badge le code pour que demain vous puissiez à la fois franchir cette grille et à la fois passer la grille de la cour intérieure, c’est le même code. Mais ici il vous suffit de passer votre carte dans la fente et la barrière s’ouvrira, alors que dans la cour il vous faudra taper le code. Vous avez…

Mais soudain on entend une voix hurlée dans un haut-parleur,

  • Alors Michel ce n’est pas bientôt finis vos conciliabules, je n’ai pas que ça à faire ?

Monsieur Michel ouvre rapidement le portail et les voitures peuvent s’en aller, mais le frère du boss ne l’entend pas ainsi et il se précipite sur le pauvre garde à qui il flanque une magistrale gifle ce que voit Myriam dans son rétroviseur, mais hélas elle n’ose descendre de voiture craignant que son intervention la mette dehors plus vite qu’elle n’est rentrée. Elle ne doit pas faire de remous, ni se faire remarquer, déjà la chanson de Brassens tantôt elle aurait mieux fait de s’abstenir. Elle va prendre les petites routes pour rentrer chez elle, elle s’arrêtera dans la petite auberge, celle au bon goût d’antan, aussi bien côté nourriture que décor. Une petite chaumière aux volets marron et aux rideaux à carreaux rouges et blancs. Là-bas elle y est allée plusieurs fois, la nourriture est simple et la patronne est une vraie maman pour elle. Mais plus elle avance, plus elle a une sensation bizarre, il y a derrière elle une voiture noire aux vitres teintées, elle serait donc suivie. Voilà qui allait devenir palpitant. Adieu le repas à l’auberge, elle devait bien avoir quelques biscuits dans sa boîte à gants, en tous les cas sur le siège passager, elle a une bouteille d’eau, elle ralentit et boit tranquillement. La voiture derrière elle s’est arrêtée, faut-il qu’elle profite de ce moment pour accélérer. Elle verra si elle se fait des idées ou si elle est réellement suivie. Aussitôt elle laisse sa bouteille et passe rapidement une vitesse après avoir repris sa vitesse de croisière, elle accélère et disparaît aux yeux de celui qui s’est arrêté sur le parking improvisé. Elle connait la route par cœur, elle sait qu’à gauche il y a un petit chemin qui s’enfonce dans les bois, elle va tourner mais seulement si l’autre n’a pas eu le temps de redémarrer. Avant de prendre le tournant elle voit que l’autre démarre mais elle a une longueur d’avance, elle prend immédiatement le chemin de terre situé juste après le virage. Elle se gare et n’attends pas longtemps pour voir passer devant-elle la voiture noire, elle entend les pneus crissés sur la route. Si son poursuivant n’a pas l’habitude, il risque de faire une sortie de route. C’est probablement ce qu’il lui est arrivée, mais elle ne s’attarde pas à le vérifier, elle fait demi-tour et regagne la voie express et elle arrive sans encombre chez elle. Elle est accueillie par Cathy et une autre jeune femme qui a dans ses bras un bébé.

    • Mais où étais-tu passé cela fait une heure que nous t’attendons,
    • Tout d’abord, entrons, je vais vous raconter, et qui est cette dame ?
    • Amalia tu ne me reconnais pas ?
    • Lisette, mais il y a plus de 10 ans, et tu as changé.

    Elle n’ose ajouter et aussi grossis, en effet la jolie Lisette de ses quinze ans a dû prendre plus de 20 kilos, mais elle a un petit garçon dans ses bras, cela peut expliquer ceci. Mais Lisette s’aperçoit des questions que se pose son amie d’adolescence, aussi elle prend les devants et lui dit, je viens d’avoir des jumeaux et j’ai pris énormément de kilos. Mais dès que j’aurais repris le travail, tu as dû voir comme on est obligé d’abattre du travail, je vais rapidement les perdre. Myriam l’embrasse car son amie a dû se justifier devant elle, alors qu’elle ne lui avait rien demandé, elle a dû exprimer sur son visage ce que jamais elle n’aurait dû faire.

    • Bon les filles je vais manger un petit bout car je n’ai pas pris de déjeuner.
    • Mais qu’as-tu fait tout ce temps ?
    • J’ai dû fausser compagnie à un suiveur ;
    • A qui ?
    • Je l’ignore mais vous allez me le dire, il avait une voiture noire avec des vitres teintées. Il m’a suivi dès que j’ai quitté la voie express pour faire l’école buissonnière comme nous faisions autrefois quand nous rentrions du lycée.
    • Le Boss a une voiture blanche et Olivier son frère en a une rouge.
    • Et la contremaîtresse ?
    • Elle a une 2 CV, ce n’est pas une belle voiture noire, tu es certaine que l’on te suivait ?
    • Lorsque j’ai vu cette grosse voiture derrière moi qui mettait son clignotant à chaque fois que je tournais, j’ai pris le chemin forestier situé juste après le tournant et avant les épingles à cheveux. J’ai attendu, je l’ai entendu arriver, il a pris le tournant comme un fou, je pense qu’à l’heure qu’il est soit il est dans le fossé, soit en route pour l’hôpital ce qui revient à dire la même chose.
    • S’il a dépassé le chemin forestier c’est forcément qu’il n’est pas d’ici.
    • Oui ! En effet tu as raison, Lisette je n’y avais pas songé.

Allez oublions ce suiveur, et nous verrons demain comment la journée va se passer, pour aujourd’hui je me sens en pleine forme.

  • En tous les cas pour le bizutage tu m’as épaté, je voulais te le dire hier, puis Lisette m’a fait comprendre qu’il serait préférable que je m’abstienne pour que tu puisses le vivre comme chacune d’entre nous. Alors là chapeau ! Tu as certainement l’estime des tueurs et aussi de l’ensemble des filles. Par contre « Le Boss » va t’avoir à l’œil, méfies-toi de lui et de son protégé son cher petit frère.
  • Ne vous inquiétez pas mes amies, je suis blindée.

 

Hélas, il flottait déjà sur les abattoirs une odeur nauséabonde, comme si l’arrivée de cette jeune femme allait rallumer une mèche qui ne s’était jamais éteinte.

A suivre…

 

Auteur : Eva Joe

Ma plume ne s'essouffle jamais, elle dessine des arabesques sur la page de mes nuits, elle se pare comme un soleil en defroissant le ciel. En la suivant vous croiserez tantôt Pierrot et Colombine dans mes poèmes ou Mathéo et son secret et bien d'autres personnages dans mes nouvelles et mes suspenses.

6 réflexions sur « La vie d’à côté (suite 1) »

  1. Il me manque un bout ! où est-il passé ? Entre la contremaîtresse qui la regarde d’un sale oeil et là au sortir de la douche.
    Bon, je vais continuer à lire quand même.
    J’ai lu et à part qu’elle est allée prendre une douche et que Olive, je pense l’a suivie … Quel sale type lui aussi. Cela ne m’a pas posé de problème pour récupérer tes idées.
    Qu’y a-t-il dans cette usine comme secret ?
    Bon, je ne dis plus rien, j’attends la suite.

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    1. Coucou,

      Merci de m’avoir signalé qu’il manquait un bout, rire, je ne sais pas ce qui s’est passé je pense que c’est au moment du copié collé entre mon Word et mon blog que j’ai dû être distraite..

      Je vais t’avertir en message privé pour que tu viennes lire le début…Rire!

      Je vois que tu essayes de récupérer mes idées, rire! Bon courage….

      Bises

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  2. Coucou Evajoe,

    Cette suite est palpitante. j’aime beaucoup. Comme toujours tu nous laisses avec de nouvelles questions et ça, c’est très bien.
    gros bisous qui attendent la suite
    🙂 🙂

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