Apres cette rencontre je n’ai vu personne, à croire que ce chemin n’est fréquenté que par les chèvres, car j’en ai vu cinq autres, proche d’un petit ruisseau. Moi qui pensait croiser la bergère je ne l’ai point vu. J’aurais bien taillé une bavette. Quant à lui conter fleurette ce serait pour plus tard.
Au detour du chemin j’entends un son de clarines, ce doit être des vaches, les pauvres il faut qu’elles aient le pieds montagnard car la pente est vertigineuse. Le chemin semble s’arrêter dans un pré bordé d’un tas de rochers qui ont dû tomber. Deux belles vaches mangent paisiblement.
Il n’y a pas de bergers. Soudain je vois surgir un beau Patou, blanc comme la neige. Il s’approche de moi, me renifle et repart derrière le plus grand et gros des rochers. Comme il est plus de 14 h et que la faim me tenaille le ventre, je m’adosse à cette pyramide et tire de mon sac le casse croûte que Jean mon grand-père d’adoption m’a si gentiment offert.
Un saucisson sec, un pâté d’herbes car il est plus vert que rouge, je verrais ce que c’est en le goûtant, un bon calendos, enfin camembert, mais j’ai toujours aimé ce fromage et au grand dam de ma femme j’ai toujours dit « calendos ». Faut dire qu’elle était de la haute.
Moi je sortais des quartiers de Lyon, ceux qui fabriquent des voyous. La Duchère au lycée on me regardait d’un sale œil. Je lui disais toi tu es la Duchesse moi je viens de la Duchère ce n’est pas compatible mais on s’aime. Je rêvais moi le prolétaire comme si on allait vivre comme mes vieux plus de cinquante ans ensemble.
Comme un calendos peut vous faire remonter dix ans en arrière, je ne vais pas chialer ni rire mais qui sait un jour, mes deux mômes viendront à Lajaresse me voir.
Allez Xavier si tu l’attaquais ce « sauciflard », il sent bon. Et le pain de Jean est un peu racis mais son saucisson est à tombé comme disent les jeunes.
Et pépé Jean tu ne m’avais pas dit que ton rouge ce n’était pas de la piquette mais un Bordeaux. Dans sa gourde il avait mis du vin rouge épais avec un arrière goût de mûres. Et bien le notaire avait du savoir-vivre. Je lui téléphonerais lorsque je serai installé. Et surtout je le remercierais, mais pour l’instant je termine mon repas par une pomme, un peu flétrie mais fort juteuse. Quant au pâté je ne sais pas ce qu’il y avait dedans. Du sucré et du salé. Je le saurais dans le village. Le boulanger du coin me renseignera.
Bon il est quinze heures j’ai mangé comme un ogre. Comme Jean quittait sa maison, il n’a pas dû laisser de provisions. J’ai fait quelques courses mais sur place je verrais bien. Il y a des vaches et des chèvres j’arriverais bien à rencontrer les bergers. Si le Patou est allé derrière le rocher en forme de pyramide c’est qu’il y a un passage.
En effet, il y a une trouée toujours en rouge et blanc comme le GR que je suis depuis mon départ de Vallon-pont-d’arc. Mais comment Jean est-il descendu de son village ? Moi je suis fourbu, je vais bien dormir la nuit prochaine. Lui qui n’arrivait pas à monter les marches du bus, je ne le vois pas emprunter ce chemin rocailleux et escarpé. Certes il le descendait mais c’est bien pire. A moins que mon hôtesse ne m’ait pas dit qu’il y avait une route, elle a dû m’indiquer le plus court chemin.
J’entends à nouveau des clarines, les vaches sont sur le chemin mais il y a avec le chien blanc un gamin d’une dizaine d’années. Il mâchouille un brin d’herbe et me regarde fort étonné. Il ne doit pas voir souvent des hommes qui montent ce chemin. Je vais faire un brin de causette.
Bonjour
…
Rien, ce gamin me regarde mais ni il me dit bonjour ni il me salue en soulevant sa casquette. Faut-il que je passe mon chemin ou que je lui demande s’il a perdu sa langue ? J’opte pour la politesse.
Alors Petit tu as perdu ta langue ? Peux-tu me dire si je suis loin de Lajaresse ?
Il se lève s’approche de moi , avec sa main il me montre le ciel et sur un piton rocheux je vois un château ou tout au moins ce qu’il en reste. Une tour à moitié cassée, des murs effondrés et un clocher pointu qui devait abriter une église.
Je suis décontenancé, si c’est ça le village il n’en reste pas grands choses. Finalement le gamin sait parler et il me dit le village est juste en dessous. Tu vas voir mon grand-père ou mon arrière-grand-mère. J’opte pour la plus âgée, il y a des chances que ce soit la soeur de Jean.
Ah ! Tu la connais comment ?
Toi tu t’appelles comment ?
Je suis le fils Pol !
L’arrière petit fils de Jean ?
Non son arrière petit neveu
Moi je suis son petit-fils
Ah ! Tu n’es jamais venu voir ta Grande tante.
Je viens aujourd’hui
Et bien c’est trop tard
Pourquoi ?
Elle est aveugle, elle ne pourra pas te voir.
Ce n’est pas grave , elle sera heureuse d’avoir des nouvelles de son frère.
Tu l’as vu ?
Oui je l’ai quitté ce matin, pourquoi ?
Sa sœur n’avait plus de nouvelles depuis dix ans.
A suivre…
Un village qui se niche dans « le trou du cul du monde » et déjà une énigme qui se profile…😂
Bises et bon mardi – Zaza
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Bonjour Evajoe,
C’est entre nulle part et ailleurs ce village! 🙂 ( expression de mon beau-père que nous avons reprise à notre compte mon mari et moi) . Un gamin, un patou et un excellent pique nique. Et le suspense distillé au compte gouttes. Sympa ce premier épisode.
gros bisous
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Un curieux de village, que celui là, Eva Joe !!!
Bonne soirée,
Bisous♥
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Étonnant s’ils vivaient si proches !
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