Lumières dans la nuit/9

Suis-je heureux d’apprendre l’existence de ce demi-frère au moment où je le lis, j’en ai aucun souvenir. C’est à la fois une immense joie, nous sommes deux et à la fois un poids.

Je pense que c’est trop d’émotion en peu de jours. Un grand-père et une grande famille. Alors que j’étais enfant unique d’un couple qui m’aimait sans me permettre d’exister. J’existais au travers d’eux. Mon père adoptif avait l’impression que je sortais d’une famille sans le sou, illettré et qui ne m’avait pas armé pour la vie. Ce n’était pas dans le ventre de ma mère que j’aurais pu recevoir toutes les aides.

Aujourd’hui il s’avérait que sa théorie était plus que fausse. Mais je n’irais pas le lui dire. Et en regardant ma montre je m’aperçois que je n’ai pas décroché mon téléphone. Au contraire je l’ai éteint.

Je vais consulter ma messagerie et voir ce que me voulait ma mère adoptive. En ouvrant mon portable je vois vingt appels en absence. Tous proviennent de la ligne fixe de mes parents adoptifs.

Il y a même un sms du portable de ma mère alors qu’elle l’utilise rarement :

 » Urgent rappel moi vite ».

Je connais ma mère, elle s’affole vite, mais je n’ai pas terminé de me mettre ces mots dans la tête qu’une sonnerie insistante me rappelle.

Maman mais que se passe-t-il ? Mon coeur parle pour cette femme, ma mère qui a su m’aimer et qui a dû courber l’échine devant mon père. Sa voix tremble, je la sens complètement affolée.

Xavier il est venu , il rode, ton père… Et là elle sanglote, pleure et dans un cri désespéré me lance :

Il a tué ton père

Qui ? Mais je n’ai pas besoin de m’ éterniser à chercher un coupable, en un instant j’ai compris.

Que dire à sa compagne, son amour, sa femme que son cher et tendre n’est plus en ce bas monde tué par le gamin qu’à mon tour j’ai adopté. L’histoire se répète une seconde fois. Eux qui lui avaient tout donner…

Il a dû aller demander à mon père de l’argent. Et ça a dû mal tourné. Pourtant connaissant mon père il aurait pu comme de nombreuses fois auparavant, lui donner son argent. Est-ce à cause de ce que j’ai dit à mon père adoptif qu’il a refusé. Où ne plus voir ses petits enfants l’a poussé à lui dire non. Mais ils avaient mis le doigt dans un engrenage qui avait dû faire basculer ce gamin. Ceux qui lui avaient tout donné, a leur tour l’avait abandonné Bref je ne savais rien, mais je me doutais.

Ma mère me supplie de venir, elle est dépassée par les évènements. Elle me parle du SRPJ de Lyon. Elle mélange tout. Excédé je lui demande de se taire et lui dit que je serais dès demain matin chez elle.

Je préviens ma Grande-tante que je vais sur Lyon une petite semaine, voir un peu moins car je dois déposer mon plus jeune fils au départ du bus pour ses vacances. Décidément c’est un vrai sac de nœuds, tout est en même temps.

Je dois récupérer Julien mon fils aîné, Claude me propose de m’accompagner. Sa femme gérera le plus pressé, pour le reste elle se fera aider par son beau-père. Et nous voici parti en 4×4 pour Lyon. Nous pourrons nous relayer au volant. Je prends des médicaments qui m’endorme. A deux c’est beaucoup mieux.

Je rappelle celle que je considérais comme ma vraie mère jusqu’à ce jour funeste où mon amour pour eux avait été bafoué. Et à nouveau un mort. Mon père adoptif, à qui je n’aurais pas dit adieu. C’est trop tard, aussi cruel que cela puisse paraître je n’ai pas de remords. Il a pourris ce gamin que je lui avait confié, ce n’était pas pour en faire un délinquant mais parce que je connaissais ses méthodes. Mais pourquoi ne les avait-il pas appliqué ?

Nous avons rien dans le ventre. Sur l’autoroute il y a du monde, c’est l’heure de sortie de la France qui travaille. Une petite halte s’impose, nous sommes au niveau de St Vallier, je connais un petit resto, nous rejoignons la Nationale 7.

Je connais la patronne, j’étais venu non loin de là faire un reportage sur la Centrale nucléaire. Et le soir nous étions venus manger chez elle. J’étais avec mon cameraman et une collègue. Elle s’en souvient, mais elle a envie de savoir ce que je suis devenu, et, je n’ai nullement envie de m’étaler sur ma vie privée.

C’est Claude qui m’enlève une épine du pieds, il intervient en lui demandant la carte. Elle s’excuse et part servir des habitués. Nous mangeons tranquillement, Claude se rend compte que je ne parle jamais de mon travail, mais plus tard il va me dire : »j’attendais que tu sois prêt ». Je lui en suis reconnaissant encore aujourd’hui.

Nous repartons vers 20 h, sur l’autoroute il y a eu un accident, nous restons sur la 7, hélas sur Vienne un énorme bouchon va nous ralentir. J’appelle ma mère, elle pleure mais une de ses voisines me répond à sa place et me dit que la police vient juste de permettre à la scientifique d’emmener le corps.

je lui confirme que nous sommes aux portes de Lyon et espérons y être vers 21 h 30. Elle me dit m’attendre. Je ne pose aucune autre question. Je verrais sur place.

Par contre j’appelle un ami qui travaille au Commissariat de la Duchère. Il est encore au boulot et en apprenant que je vais arriver sur Lyon, il me dit de passer demain matin. J’en saurais mieux, car ma mère est incohérente.

Claude veut aller dormir à l’hôtel. Il rêve, chez mes parents il y a des chambres. Il en aura une pour lui. Il me remercie. Nous arrivons enfin à la Duchère, Claude est sous le choc de la cité. Mes parents adoptifs sont monté en grade au fil des ans. Ils ont achetés leur appartement. Il est situé au 7 ième étage d’une barre longue comme un jour sans fin.

Claude espère que l’ascenseur marche car il aurait du mal à monter les sept étages à pieds. Je lui explique que nous sommes dans la partie copropriété, et qu’en général l’ascenseur marche. Il m’avoue en montant emprunter ce genre d’engin pour la première fois. Il s’agrippe à la barre et ne se rend pas compte que je l’observe dans la glace située au-dessus. Je ne dis rien. C’est déjà très sympa d’avoir voulu m’accompagner.

Nous voici arrivés, j’entre dans frapper. Ma mère est assise dans la méridienne de mon père, les yeux rouges, la mine défaite. Elle me regarde comme si j’étais un revenant et me dit :

Tu en as mis du temps

Pourquoi me dis-tu ça ?

Ton père est mort en te pleurant tous les jours et tu arrives le jour où il est parti.

Par egard pour ton chagrin je ne te dirais rien. Mais entre nous les téléphones ne sont pas faits pour les chiens.

Et je me tourne vers la voisine et la remercie. Je l’accompagne à la porte, elle me prends le bras et me dit :

Je pense que votre maman a perdu la tête.

Merci pour tout. Au revoir.

Je referme la porte, m’appuie dessus et m’en retourne vers Claude que j’ai laissé le temps de me calmer. lorsque j’entre dans la piece, Claude sert un thé à ma mère qui est redevenue celle que j’aime et qui ne m’a jamais apostrophé de reproches.

Elle se jette dans mes bras et me dit pardon, je ne sais pas ce qu’il m’arrive.

Claude est mon cousin

Ton cousin, mais tu n’en as jamais eu à part Delphine la fille de ma sœur.

Et bien j’ai retrouvé ma famille, la vraie.

Ma mère me regarde, titube et s’évanouit.

A suivre…

Auteur : Eva Joe

Ma plume ne s'essouffle jamais, elle dessine des arabesques sur la page de mes nuits, elle se pare comme un soleil en defroissant le ciel. En la suivant vous croiserez tantôt Pierrot et Colombine dans mes poèmes ou Mathéo et son secret et bien d'autres personnages dans mes nouvelles et mes suspenses.

4 réflexions sur « Lumières dans la nuit/9 »

  1. Mais oui, mais c’est bien sûr, le grand-père d’adoption vient de payer cher son laxisme avec ce petit-fils… A ne pas le reprendre et à tout céder, cela devait mal tourner.
    Pauvre mère adoptive qui a perdu sa moitié…
    A suivre donc.
    Bises et bon mercredi – Zaza

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  2. Bonsoir Evajoe,

    Les évènements se bousculent! Il en apprend des choses Xavier! Pareil pour sa mère adoptive! Que d’émotions pour cette femme qui se réfugie dans l’inconscience. L’intérêt est maintenu. C’est super!
    Gros bisous

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